« Il disait que la neige apaise la tristesse et la colère, que le monde devient blanc comme un écran de cinéma. Je pense à mon Papy et à ses mots qui étaient doux comme des flocons. »
En voilà une idée de cadeau à déposer sous le sapin en cette période de fêtes hivernales. A fortiori si l’enfant à qui il est destiné a perdu un être cher…
Dans ce récit rédigé par Frank Andriat et mis en dessins par Sarah Parmentier, on suit les aventures d’un bonhomme de neige qui ressemble à s’y méprendre au Papy du jeune narrateur. Comme lui, il est grand et fort. Comme lui, il est beau et fier. Pourtant, avec la remontée des températures, il perd peu à peu de sa superbe. Et à l’enfant de dresser alors une analogie avec les derniers moments de son Papy. Se pourrait-il que son bonhomme de neige finisse par disparaître lui aussi ? Se pourrait-il que cette disparition ne soit pas une fin en soi ?
A travers cette histoire illustrée tout en douceur ouatée, on suit le cheminement de pensée de l’enfant qui revit, avec le soutien de ses parents, un événement douloureux qu’il a bien des peines à comprendre, à admettre. « C’est la vie » lui dit son papa. Mais les mots ne veulent pas dire grand chose. Par contre, ce bonhomme qui rétrécit de jour en jour, ça, ça lui parle ! Jusqu’au bout, il met tout en oeuvre pour le sauver. Mais il est des batailles qu’on ne peut remporter. L’enfant le comprend, s’apaise et sourit, assis sur le petit tas de neige qui fait de la résistance pour quelques instants encore : son papy de neige est devenu lumière…
Cette image parlante du Papy de neige constitue un biais tout doux pour aborder le délicat sujet de la mort. Ce n’est pas le seul point fort de cet album. D’autres éléments du texte comme des images ne manqueront pas de plaire au jeune lecteur ainsi qu’au parent qui l’accompagnera dans sa découverte : la complicité qui unit le père et le fils ; ce papy à la barbe à papa ; cette image pleine d’empathie où les parents observent leur fils observant son bonhomme de neige rétrécir ; cette double page remplie de cadres de famille qui offre le temps de se poser dans le récit, histoire de comprendre que le cercle de la vie constitue des étapes sans cesse renouvelées ; ces deux petits oiseaux qui passent de page en page, témoins des joies et des peines de ce petit d’homme ; etc. A vous de découvrir les autres surprises de ce petit carré tout doux malgré le sujet grave qu’il met en scène.
Pour ma part, cet album m’a attendrie et enthousiasmée. J’espère que d’autres textes de Frank Andriat feront l’objet d’une aussi belle mise en images. En attendant, je prolonge le plaisir en relisant un autre de ses textes, « Rouge, la neige »(1), message d’amour et de tolérance écrit suite aux attentats de Paris… Je ne résiste pas à l’envie de vous en partager le final : « Boule après boule, j’ai confectionné un immense bonhomme de neige. J’aurais voulu qu’il atteigne le ciel! Ensuite, malgré les larmes qui coulaient sur mes joues, je lui ai dessiné un sourire sur le visage : mon bonhomme tout neuf, c’est mon Papa qui rit. Comme nous tous, il est éphémère, mais il est vivant comme les flocons d’amour qui parsèment les versets du Coran. »
(1) in Le peuple des Lumières, Double jeu, Ker éditions, 2015
Céline Brijs, La coupe et les lèvres, 7 décembre 2016.
Une belle leçon de vie rehaussée d’illustrations empreintes d’émotion et de poésie. Un album pour grandir.
Libbylit, n°127, décembre 2016.