Geneviève DAMAS

© Francesca Mantovani – Gallimard

          Chère Geneviève,

          Parler de vos livres, c’est parler de générosité et d’empathie. Parler de vos livres, c’est écouter le chant de l’humain et ouvrir les portes de la sensibilité et de l’intelligence. Vous donnez la parole aux blessés, aux solitaires, aux égarés, mais chacun de nous n’est-il pas un peu cela ?

          Dans le superbe Patricia, vous nous offrez de rencontrer Jean Iritimbi, un Centrafricain sans papiers aux rêves déchirés, vous nous donnez à réfléchir à la situation de nos sœurs et de nos frères humains qui n’ont rien et qui cultivent, pour leur malheur, les rêves d’une Europe opulente et accueillante, vous nous montrez, chère Geneviève, que la richesse des cœurs est sans cesse à construire pour aller au-delà des blessures, des fêlures, des mensonges, de la méfiance et pour créer des liens véritables.

          Vos personnages, Patricia, Jean et Vanessa, qui, au fil du roman, prennent la parole (ou la retrouvent) touchent au cœur grâce à la justesse aimante de vos phrases, grâce à l’écoute véritable que vous leur accordez. Vous êtes une auteure empathique, une auteure généreuse et sensible, vous accompagnez avec tendresse celles et ceux qui peuplent vos pages et vous suivez leur traversée vers une vie meilleure avec une réelle émotion qui n’a jamais rien de mièvre ou de surfait.

          Déjà, dans Si tu passes la rivière, vous nous offriez une histoire de déchirure et de solitude, de mots volés et de silences lourds, un récit d’exil intérieur et de retrouvailles avec soi, un roman tourbillonnant, enveloppant, marqué du sceau de la cruauté et pourtant profondément rédempteur. Patricia, votre nouvel opus, malgré l’absence et les ombres, conduit aussi vers le lien et la parole retrouvée.

          Chère Geneviève, si vos personnages nous touchent tant, c’est parce que, comme nous tous, au plus profond d’eux-mêmes, ils cherchent une patrie, parce qu’au delà des fuites et des abandons, ils finissent par trouver une terre où se construire. S’ils rencontrent notre cœur avec tant de présence, c’est parce que vous utilisez, pour les faire vivre, une écriture plurielle, simple, honnête et gorgée de sens. Vos mots se lisent et se disent, vos phrases chantent, légères, porteuses de tant d’humanité, profondes et dansantes.

          Vous parlez de destins qui pourraient être les nôtres, vous n’évitez pas la souffrance et, avec une rare délicatesse, vous dénoncez, à travers ce que vivent vos héros, les mille lâchetés qui parsèment nos existences. Merci d’offrir aux réfugiés une terre d’asile, celle du cœur et de la tendresse. Merci d’ouvrir au partage et à l’accueil des différences.

          Chère Geneviève, vos livres sont précieux. Ils nous rappellent qu’il est terrible de tout perdre, mais plus terrible encore de ne pas aimer et ils nous apprennent, avec beaucoup de grâce, à aimer mieux.

 

Frank Andriat

 

Geneviève Damas, Patricia, Gallimard, 2017

Geneviève Damas, Si tu passes la rivière, Le Livre de Poche, 2014

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