Un modèle de prof
À force de côtoyer ses étudiants de l’Athénée de Schaerbeek,
Frank Andriat ne vieillit pas ! Il a toujours cette image d’adolescent souriant,
ce regard pétillant derrière ses petites lunettes.
Dans ses livres, un leitmotiv : la tolérance, toujours !
«Vers treize, quatorze ans, j’étais assez timide. Je me suis mis à écrire pour exprimer ce que j’éprouvais.» Pas son journal intime, oh non, mais de la poésie, comme tout ado romantique. Sa rencontre avec Thomas Owen est décisive, son désir d’écrire grandit, il travaille sur des contes fantastiques, puis sur un premier roman. D’aussi loin qu’il se souvienne, la plume le démange. Un héritage artistique familial : «Mon grand-père était un raconteur d’histoires et connaissait Michel de Ghelderode. Vous imaginez, de Ghelderode me promenant dans ma poussette au parc ? Je crois à ces petits signes du destin.» La commune de Schaerbeek semble marquer toutes les étapes de la vie de Frank Andriat. Vivre à Schaerbeek l’a ouvert à la différence et au respect de l’autre. «Y vivre, y travailler, me fait rencontrer des gens d’origines diverses. En tant que professeur, j’ai appris à mieux comprendre les jeunes, leurs problèmes. J’ai vécu des phénomènes de racisme, de rejet, j’ai souffert avec ces gosses que je connais bien et que je fréquente au quotidien. En laissant parler mon cœur, j’ai nourri mon écriture.»
Quand Frank n’écrit pas des histoires se déroulant à Bruxelles, il emmène ses personnages du côté de la Gaume, une région qu’il affectionne, près de Virton, et où il se réfugie régulièrement avec sa compagne. C’est là qu’il écrit le plus volontiers, au calme, loin de ses tribulations de prof de français. «Le seul endroit où je peux rester sans écrire, c’est Madère.» Frank Andriat écrit beaucoup : des nouvelles, des romans, pour jeunes, pour adultes, des essais, des contes. Le premier roman qui connut un vrai succès fut le Journal de Jamila en 1986. «Mes bouquins qui marchent le mieux sont mes livres pour ados. Les gens ont tendance à croire que je me suis cantonné à ce style. Or, quand je commence une histoire, je ne pense pas en termes d’ado ou d’adulte ! Là, je me lance enfin dans un gros roman qui fera trois cents à quatre cents pages. Autre projet : un scénario de bandes dessinées.» Tout ça, Frank le peaufine sur son petit bureau bruxellois, entre quelques dessins fantastiques sur des murs colorés et son fauteuil à bascule. Le bonheur, c’est simple comme un geste vers l’autre.
Gilda BENJAMIN, LE SOIR MAGAZINE, 24 juillet 2002.