Frank Andriat, un témoin d’ici
Être témoin des choses d’ici, être un relais
entre le monde des ados et celui des adultes.
Voilà une démarche qui l’on devine vivante chez Frank Andriat,
après la publication d’un roman et d’un document.
Son roman, Mes copains m’appellent Flash, est l’histoire d’un amour entre deux ados de notre époque. Son document est le témoignage collectif autour d’une des personnalités musicales populaires auprès de tous :Jean-Jacques Goldman.
Frank Andriat est prof. Il connaît les jeunes, il veut lancer au travers de ces deux bouquins-ci des messages qui les concernent en les interpellant. Frank Andriat est écrivain, le dimanche, il connaît le poids du silence dominical pour apporter à ses livres une existence sereine.
Chapeau, mon Flash !
Ce qui est terrible, quand on a quinze ans, c’est de tomber amoureux. D’une fille superbe en plus. Impossible de ne pas prendre au sérieux cette folie qui tenaille jour et nuit, Flash, un ado de l’école technique. La fille, elle, fréquente le lycée. L’un comme l’autre connaissent d’énormes problèmes avec leurs propres parents. Ceux de Flash sont bornés, un peu racistes et détestent copieusement les goûts du fiston pour les chapeaux. Ils sortent ensemble, vivent l’air frais des amours de jeunesse, ce qui ne plaît pas du tout aux parents. Alors, brusquement, le choc, l’envie de vivre à fond, de tout plaquer : les voilà en fugue chez une copine à Knokke, qui peut les cacher, le temps de faire le point.
Si la première nuit est celle de l’amour, le reste commence sérieusement à sentir le roussi à un pont tel que Flash, déçu et blessé par la découverte du caractère autoritaire de sa jeune amie, décide de se tirer de ce piège et de revenir chez lui…
Ce petit roman se termine sur une note positive même si ce jeune couple se casse les dents. Comme se sont cassés les dents tous les amours de nos quinze ans. Frank Andriat veut simplement mettre en scène des ados d’aujourd’hui pour aider, jeunes et vieux lecteurs, à mieux les comprendre. Si Flash est sympa et que son copain arabe l’est tout autant, on ne dira pas la même chose des adultes présents dans ce roman : parents, éducateurs, directeur, psychologue sont vraiment débectants. Je doute qu’un lecteur ado se réconcilie avec le monde adulte dans pareille galerie.
Un p’tit roman pour les copains pour la fraîcheur des amours d’antan, pour la vie qui vient et qui passe…
Celui qui change la vie
Après Villon, Rabelais, Rimbaud et les autres… viendra un jour Jean-Jacques Goldman, le temps peut-être que notre siècle fasse le tri des parasites médiatiques et ne retienne que les poètes. Frank Andriat écrit de lui : «J’aime Goldman parce qu’il me renvoie à mon existence, à mes réussites, à mes échecs, à mes enthousiasmes et à mes peurs. Un homme simple, presque banal, qui transmet du savoir-éprouver, pas de beaux mots, pas de brillants discours.»
Frank Andriat en a parlé à un groupe d’élèves. Il leur a proposé d’écrire ce qu’ils ressentaient à l’écoute de certaines chansons. Il les a aidés, il est devenu l’architecte d’un vaste projet qui est devenu livre publié. On peut y découvrir ce que les jeunes pensent de l’amour, de la vie, de l’indifférence, de la liberté, de la mort. Frank Andriat a relié les séquences par des traits d’ambiance, des envies de témoigner que le local «Goldman» est devenu un haut lieu d’écriture et de réflexion. Simplicité, douceur, humanité. Un livre qui regorge d’authenticité et qui, en plus, ne tombe jamais dans le gnangnan admiratif. Ce n’est pas un bouquin sur Goldman, c’est un bouquin sur les jeunes d’aujourd’hui, mené par un prof ouvert et un chanteur-auteur. A signaler que les droits d’auteurs sont versés à Médecins sans frontières.
Guy DELHASSE, LA WALLONIE, 18 janvier 1993.