Michel PAQUOT, Frank Andriat roule vers l’amour, L’AVENIR, 6 novembre 2020.

Frank Andriat roule vers l’amour

Porté par un humour revigorant, Les mardis d’Averell Dubois suit pendant un demi-siècle un vendeur de Peugeot qui finit par trouver l’amour.

            Il en est con­vaincu : le mardi est le pire jour de la semaine. C’est en effet un mardi que Joe, que tout le monde appelle Averell, car il ressemble da­vantage au plus grand des Dal­ton qu’au petit teigneux, s’est cogné à Bill Babeler en vou­lant éviter une déjection ca­nine sur le trottoir. En ce 22 juillet 1969, le lendemain du premier pas sur la Lune, le petit garçon de 12 ans est bien loin de s’imaginer que sa route ne cessera de croiser ce butor mal embouché, person­nage néfaste et sadique aussi bête que méchant. « C’est une sorte de petit Trump, commente l’auteur. Il ne voit le monde qu’en fonction de lui et n’existe qu’en écrasant les autres. »

            Cette rencontre malencon­treuse est le point de départ de nouveau roman cocasse de l’écrivain belge Frank Andriat. C’est en effet sur le ton de l’hu­mour que l’auteur du Bonheur est une valise légère va suivre pendant cinq décennies son personnage, grande bringue profondément gentille et sympathique, mais à la répar­tie pouvant être mordante. Fasciné par la généreuse poi­trine de sa voisine exhibée sur fond de tubes de Genesis, cet enfant unique traverse de ma­nière chaotique son adoles­cence, avant de trouver du tra­vail chez un concessionnaire Peugeot à soixante kilomètres de son village picard. Sous les hauts cris de sa mère « à l’affec­tion pâtissière », furieuse de voir son ingrat de fils de 23 ans la quitter, et que son père, plus philosophe, tente de calmer.

            « Je voulais raconter un roman humoristique, se souvient Frank Andriat. Pourquoi un mardi ? Je n’en ai plus la moindre idée. » Une fois retenu le deuxième jour de la semaine, il a cherché ceux qui étaient dignes d’être retenus, entre le début des années 1970 et le dé­but du XXIe siècle. Des naissances de Marion Cotillard et de Stromae à la mort de Tex Avery, en passant par la vic­toire de Cassius Clay sur Joe Frazier, la réunification du Yé­men ou les attentats du 11 septembre 2001. Ces événe­ments acquièrent une impor­tance plus ou moins grande dans la vie d’Averell, en ratta­chant certains épisodes à l’ac­tualité. Une existence égale­ ment scandée par l’évolution des modèles Peugeot.

            Les mardis d’Averell Dubois ra­conte le chemin d’un homme bon et généreux vers la félicité qu’il va connaître grâce à une Gracieux-­Berluronne (une ha­bitante de la commune de Grâce­-Berleur, dans la péri­phérie liégeoise). Donc une Belge, ce qui laisse sa mère in­terloquée. On retrouve ici, une fois encore, l’optimisme de l’écrivain prolifique. « Parler d’amour à notre époque me sem­ble important, explique­-t-­il. Écrire est, pour moi, un moment de bonheur et de partage, et j’ai envie de partager ce bonheur. J’aime faire du bien à mes lec­teurs. Je montre le côté lumineux des choses, sans nier les difficultés de l’existence. »

Au fil de ses livres, Frank An­driat navigue avec une égale réussite entre ses romans pour adolescents et adultes. « Au niveau de l’écriture, c’est la même chose, je la travaille avec la même attention. Les différences, ce sont l’âge du héros et la théma­tique qui doit le concerner. » Pour preuve, son dernier et remar­quable roman pour ados, Ru­meurs tu meurs (Mijade), où il est question du harcèlement sur les réseaux sociaux (voir nos éditions du 3 octobre der­nier).

Michel Paquot, L’Avenir, 6 novembre 2020.

Frank Andriat, Les mardis d’Averell Dubois, Genèse, 225 p.

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